Vers une nouvelle carte de France : en quête du territoire idéal
Alors que la France s’interroge sur l’efficacité de son organisation territoriale, de nombreuses voix s’élèvent pour questionner la pertinence de nos divisions administratives héritées du passé. Régions étendues, communes fusionnées, communautés d’agglomération… le débat sur le redécoupage territorial s’enfle et s’étend. Faut-il rationaliser nos territoires ? Faut-il en redessiner la carte pour une gestion plus adaptée aux réalités contemporaines ? Faut-il suivre l’exemple de nos voisins allemands, grecs ou danois ?
Historiquement, la France s’est construite sur des “territoires institués”, des provinces aux paroisses médiévales. Ce sont ceux-là qui sont aujourd’hui jugés inadaptés aux impératifs de l’action publique moderne. Ces territoires, tantôt trop vastes, tantôt trop restreints, ne collent plus, semble-t-il, aux pratiques et aux déplacements des citoyens actuels. En plus de ça, les effets de frontière engendrés par ces découpages sont perçus comme des freins à l’efficacité politique, économique et sociale.
Dans les années 1990, la Délégation à l’Aménagement du Territoire et à l’Action Régionale (DATAR) a initié un mouvement en faveur du “territoire pertinent ». Il s’agissait de promouvoir une vision plus fonctionnelle de l’aménagement. L’idée était de revigorer les “pays”, en les opposant aux rigidités des structures institutionnelles. Cette vision a progressivement débouché sur la généralisation des intercommunalités, considérées comme mieux adaptées aux dynamiques urbaines et économiques et répondant aux déplacements et aux mobilités résidentielles.
La tendance à la métropolisation, en plus d’être un fait objectif est aussi devenu un objectif qui a vite trouvé ses fervents defensseurs. De nombreux et doctes géographes, économistes et urbanistes y ont vu une adaptation nécessaire aux dynamiques économiques mondiales, où des métropoles de taille importante sont censées être mieux équipées pour rivaliser sur l’échiquier international.
Hélas, la quête d’un “optimum territorial” se révèle être un horizon insaisissable. La réforme territoriale de 2014-2016, marquée par la fusion des régions, en est un exemple éloquent. Malgré les arguments en faveur de cette réorganisation, critiques et controverses n’ont pas manqué. Le démographe Hervé Le Bras a, parmi les premiers, critiqué la confusion entre taille et puissance, tandis que l’Association des Régions de France soulignait que la taille n’était ni le problème, ni la solution. L’économiste Laurent Davezies a mis en lumière la relativité des critères, affirmant que “la bonne échelle n’existe pas”.
Aujourd’hui, a France se trouve à un carrefour, entre tradition et modernité, dans sa manière de concevoir son territoire. Les débats continuent, et la carte du futur reste à dessiner. Le véritable enjeu, au-delà des lignes sur une carte, est bien de répondre efficacement aux besoins des citoyens à travers des compétences et des moyens appropriés.
Or considérer les moyens comme une fin est la principale caractéristique des bureaucraties.