La fonction éducative et sociale du sport en question

L’analyse des politiques sportives locales
A la rencontre du mouvement sportiestion traitée

Jusqu’en septembre 2006, je participais, dans le département des Deux-Sèvres, à un groupe interministériel d’étude et de pilotage des politiques territoriales impliquant l’État. A ce titre, j’ai été chargé d’animer un programme d’observation des Contrats Educatifs Locaux (CEL)[1]. Contrairement à l’expérience précédente de recherche fondamentale, j’intervenais dans ce programme comme fonctionnaire relevant de l’un des ministères impliqués, chargé de piloter des actions de recherche finalisée. Les problématiques développées étaient négociées dans le cadre d’un comité regroupant l’ensemble des services de l’État concernés à l’échelon départemental. Les résultats avaient pour finalité la mise en œuvre de programmes opérationnels d’accompagnement des acteurs locaux (élus, techniciens…).

Pour autant, l’expérience n’en a pas été moins riche d’enseignements.

Concrètement, nous travaillions sur la place du sport dans les CEL. Le sport se présentait en effet comme l’une des activités principales des actions mises en œuvre dans le cadre des CEL. Selon les acteurs en présence, Il y apparaissait comme moyen de régulation sociale, créateur/re-créateur de lien social sur un territoire, outils de valorisation des caractéristiques physiques et environnementales du territoire, source d’emploi… Il résonnait dans le champ économique, politique, social, éducatif… Il suscitait et générait enjeux et stratégies. Il devenait un outil avec lequel chacun construit, entretien ou tente d’imposer une certaine idée de la territorialité et un modèle de la société locale. Il s’agissait pour nous d’appréhender la pratique sportive non en tant qu’activité spécifique, mais en tant qu’élément constitutif d’une politique de développement territorial. C’est l’usage qui en était fait dans le cadre d’un rapport entre dynamiques locales et société globale qui retenait notre attention.

Orientation problématique
Saisir des logiques d’acteurs au niveau local

Je concentrais mon attention sur le fonctionnement des comités de pilotage locaux. Partant du point de vue des acteurs impliqués dans la configuration d’interdépendance ainsi formée, je me donnais pour tâche d’interroger les logiques, internes et externes, qui sous-tendaient les échanges et les pratiques et orientaient des programmes d’actions concrets. Je considérais les actes observés comme des productions originales dans des systèmes d’organisations politiques et des dispositifs administratifs qui leur préexistaient. La pratique sportive apparaissait donc à la fois comme outil, enjeu et modèle de comportement dans une production collective.

Les individus observés étaient des élus locaux, des professionnels du développement local, des dirigeants ou des éducateurs sportifs. Chacun d’eux s’impliquait sur la base d’un statut et d’une fonction sociale, politique ou administrative. S’en suivaient un jeu de positions relatives et la constitution d’une configuration d’interdépendance. Mais les individus ne se réduisent ni à leur statut, ni à leur fonction. Leurs comportements renvoient à une multitude de sphères de la vie sociale. Des croyances, des appartenances, des dispositions sociales, économiques, ou politiques donnent une épaisseur sociale aux individus, orientent leurs perceptions, alimentent leurs attitudes. Il ne s’agissait donc ni de privilégier une posture rationaliste ni de développer une analyse du symbolique. Loin de s’exclure mutuellement rationnel et symbolique cohabitent. Ils s’expriment conjointement dans les situations observées. Il s’agissait de les intégrer à l’analyse.

Terrains de recherche et méthodes mobilisées
Des entités territoriales en contrat avec l’État

Cette recherche portait sur un ensemble d’une dizaine de contrats éducatifs locaux développés en Poitou-Charentes. De la commune rurale à la communauté d’agglomération, une sélection de configurations exemplaires de collectivités territoriales était observée.

Un croisement de méthodes qualitatives et quantitatives

Il s’agissait d’appréhender in situ le contenu, le sens et les enjeux des échanges observés. Comme dans le projet précédent, j’avais recours à un croisement de méthodes qualitatives et quantitatives. Une part importante était laissée à l’observation participante. Celle-ci a néanmoins été précédée d’une réflexion approfondie sur le statut de l’observateur. Dans ce programme, je relevais en effet de l’une des administrations impliquées. Il m’a donc fallu intégrer cette dimension importante et incontournable à ma démarche méthodologique.

[1] Ces contrats lient, sur un territoire déterminé, la collectivité locale de référence (commune, groupement de communes…) et les services de l’État concernés par l’éducation et l’encadrement des jeunes (Direction de la jeunesse et des sports, de la culture, inspection académique…) autour d’un projet éducatif partenarial associant les acteurs locaux (associations sportives, établissements scolaires, associations d’éducation populaire…)